L’été en string de pieds
Haaa l’été ! CET été…
La canicule est sur toute la France, les températures restent élevées la nuit et la chaleur écrasante la journée. Même pas moyen de se mettre au soleil pour tenter d’avoir meilleure mine tellement c’est insoutenable ! En même temps, on ne va pas se plaindre parce que dans moins de six mois, on pleurera les soirées où le soleil se couche tard et nos orteils réclameront le retour à la tong éternelle.
Parce que lorsqu’on ne gambade pas en runnings ou en crocs dans les couloirs de l’hôpital, on met volontiers ses doigts de pieds à l’air .👣J’ai croisé l’autre jour une jeune infirmière qui avait osé lessandales pour réaliser ses douze heures de travail et cela m’a remémoré l’épisode qui a motivé pour moi le port systématique de chaussures fermées…
J’étais, comme elle, jeune diplômée et, comme elle encore, entrée en guerre contre les Crocs qui donnent au choix, une allure de parisien en bord de mer ou un look de maraîcher débutant. Je les trouvais juste moches et ma mauvaise foi de l’époque (car depuis j’ai mûri et je sais reconnaître quand j’ai tort mais c’est tellement rare 😇…) me poussait à clamer haut et fort qu’en plus de donner une allure de pingouin, elles étaient inconfortables. Un matin donc, de bonne heure et de bonne humeur, je faisais la diurèse de mon patient en vidant le contenu de sa sonde urinaire dans le bocal qui me permettrait de quantifier ses urines. J’étais fière d’arborer des orteils aux ongles peints en rose grâce à mes sandales en cuir beige décorées de petits coquillages multicolores.Mes collègues m’avaient toutes complimentée sur le sujet, même si j’avais senti un peu de scepticisme dans le regard de certaines. Pas encore complètement réveillée (il devait être 6h45) et la trace du drap toujours imprimée sur ma joue, je ne m’étais pas demandée ce qui pouvait motiver autant de retenue dans leur expression. C’est vrai quoi ! Elles étaient canons ces petites tongs ramenées d’Espagne un an plus tôt ! Je venais donc de vider la poche de sonde urinaire de mon patient et de refermer précautionneusement le couvercle du bocal afin d’aller le vider dans les sanitaires.
Enfin c’est ce que je croyais… Lorsque je saisis ledit bocal par le couvercle (mauvaise habitude ! très mauvaise habitude ! c’est comme le bocal de cornichons mal fermé dans le frigo ! ), vous devinez aisément le drame qui s’en suivit…Seul le foutu couvercle demeura dans ma main droite…le bocal glissant irrémédiablement entre les doigts de ma main gauche. Je restai immobile et ne tentai même pas de rattraper ce qui contenait plus de 2 litres d’urines et qui serait responsable de mon drame ce jour là. L’issue était inéluctable.Pour faire court : le bocal, dans sa chute, réalisa une figure qui semblait avoir été travaillée et répétée de nombreuses fois (théorie du complot) car l’ouverture bascula, au ralentit, en direction de mes jambes avec une grâce presque insolente afin de mieux se déverser sur mes tongs et mes orteils vernis au moment de l’impact au sol.J’hésitai entre pleurer, hurler et démissionner sur le champ. Je ne fis aucun des trois et me contentai de regarder, blasée, le visage mêlé d’horreur et d’hilarité de ma collègue aide soignante qui avait assisté à toute la scène…Je vous passe les détails de l’abandon de poste pour douche urgente dans les vestiaires (à l’Hibiscrub s’il vous plait), du retour péteuse dans le service quinze minutes plus tard les pieds nus dans des sur-chaussures en plastique et de mon cœur brisé par la nécessité de jeter à la poubelle les tongs espagnoles qui faisaient ma fierté encore trente minutes plus tôt…Bref, tout ça pour dire que j’ai fini par me convertir aux crocs quelques jours plus tard et que, depuis, mon sac de travail contient toujours une paire de chaussettes de secours.
Je milite aujourd’hui pour les tongs éternelles, les strings de pieds continuels mais je suis également bienveillante vis à vis de mes orteils à qui j’avais promis de ne jamais les exposer de nouveau à de tels dangers.Maintenant, même en période de canicule, je porte chaussettes et chaussures pendant mes journées de travail. Je ne souhaite pas à ma jeune collègue de vivre une expérience comme la mienne mais je crois, malheureusement qu’un jour ou l’autre, elle devra présenter des excuses à ses ongles de pieds vernis.
Je pense réellement qu’il faudrait songer à créer des chaussures d’hôpital avec une mini-clim intégrée pour un meilleur confort estival (à bon entendeur….). En attendant, je me contente de trouver un peu de fraicheur dans les chambres des patients qui ont des ventilateurs et maitrise à la perfection, maintenant, la fermeture du bocal de cornichons…